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PATRICE DANSEREAU

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Je voudrais ce soir, vous dire tout le bien que je pense de Patrick Besson. Ça tient à peu de mots et pourrais même se résumer à ceci: cet écrivain est d'une profonde superficialité. Ou d'une super profondeur, ce qui revient au même. D'une extrême inactualité, ce qui traduit sa grande actualité.

Vous n'avez pas besoin de lui, et c'est pourquoi je prends le temps de vous en parler.

Je passe il est vrai très vite sur ses romans. Je plonge avec délices sur ses petits caprices. Appelons-les, essais, miettes, notules, articles et quoi encore... Aucune importance, car c'est précisément dans ces petits riens que tout se trouve. Vraiment des petits riens... des éclats de rire ou de génie, des illuminations et des divagations, de la facilité et du travail, du spontané et du quatre-cent-cinquième niveaux...

Je ne résiste pas au plaisir de laisser la place à l'écrivain, qui a vraiment le sens de la note...
je débute avec ceci qui n,a rien à voir avec ce qui précède puisqu'il s'agit d'une interview à la télévision française; retranscription, donc:

— Quel conseil vous donneriez à quelqu’un qui veut être écrivain ? A part du talent ! Mais en terme de méthode.


— Je dirais de n’avoir peur de rien. C’est le seul conseil que je peux donner. De ne jamais avoir peur. Le plus grand écrivain est celui qui a eu le moins peur.


— Peur de quoi, d’être mauvais ?

Peur de tout, d’être mauvais, de rater sa vie, de mourir, de ne pas réussir à publier ses livres, que le livre n’ait pas de succès, de mourir pendu avec son chapeau et les pieds touchant par terre comme Nerval…


— Parce qu’on dit que le processus créatif part d’un manque, d’une angoisse, d’une

fin… vous non ?


— C’est un trop plein plutôt, c’est trop de choses, donc il faut les sortir. Mais c’est vraiment l’activité qui, je crois, demande le plus d’audace parce que c’est une audace physique d’abord, une audace sociale et une audace morale. C’est exprimer des choses qui sont vraiment profondes, secrètes, que l’on n’aimerait pas que les gens sachent et qu’il faut quand même leurs dire.


Patrick Beson à la télévision française, INTERLIGNES (2010)_


Je rajoute quelques lignes que je viens de lire, ce soir: quelques extraits de son astrologie toute personnelle (exclusivement conjuguée au féminin); drôle et pertinent, avec toute la profondeur de la légèreté qui le caractérise ( à lire conjointement avec l'excellent Horoscope cruel de Jean-Luc Hennig — on en reparlera de celui-là). Quelques signes au hasard, donc:


— La vierge: «la vierge n'est pas folle; elle est drôle… dans une fête elle mettra de l'ambiance, même si elle a l'Intention de se suicider après… La vierge est une pessimiste, c'est la raison qu'elle aime tant s'amuser.»


— La scorpion: «Dès que je vois une scorpion, c'est plus fort que moi, j'ai peur. Sans doute parce que je la désire trop… [elle fait] passer ses désirs avant la réalité, et peut-être même avant leur réalisation… La scorpion est un appétit que rien ne satisfait, un gouffre que rien ne comble. Elle est un vide métaphysique trop physique…»


— La poisson: «La poisson pense que dans la vie il y a toujours mieux — et c'est ce qui l'amène bien souvent au pire… Elle semble toujours séparée de la réalité par la vitre d'un aquarium… Pour les Poissons, le temps ne passe pas , car de toute façon, elles vivent dans leur mémoire depuis le jour de leur naissance…»,


— La Verseau: «La Verseau a été envoyée sur Terre pour mettre un terme à vos ennuis, régler vos problèmes, calmer vos angoisses… La Verseau aime s'occuper de vous mais ne s'occupe pas de vous aimer: elle a trop de bonnes actions en route.»


— La Capricorne: «La Capricorne est une dure qui rêve tout le temps… C'est une bonne amie et une bonne maîtresse, une fois qu'après plusieurs mois de réflexion, elle a choisit son camp. Il ne faut pas la trahir car elle souffrirait beaucoup, mais en silence.»


— La lion: «Elle est anxieuse. Elle sait qu'elle est la reine des animaux mais se demande si elle le restera… Aux hommes elle donne tout mais ne demande rien en échange… de cette façon on ne lui fera pas de reproches. La lion déteste les reproches, c'est la raison pour laquelle elle a décidé d'être parfaite.»


Autres moments ce soir de grand plaisir à traquer sa lucidité hilarante; son texte, Cynique, moi? écoutons-le parler du cynisme. Qu'est-ce que le cynisme:

«la manifestation plus ou moins joviale et maladroite de notre esprit d'indépendance, le refus relativement poli des conventions sociales… et enfin le désir brut et sans nuance de changer une société dont les règles nous paraissent injustes»


Définition qu'il faut accompagner de la thèse suivante:

«le jeu des cyniques au pouvoir est d'accuser de cynisme les gens purs et de vanter la pureté des gens cyniques…»




Bon, je retourne à mes lectures... allez-y voir, ce jeune homme de 52 ans mérite que l'on tende l'oreille, car il semble que c'est justement de cela dont nous souffrons: un étonnante perte d'audition quand les accents vrais et la note juste se fait entendre. Ça pourrait nous changer du brouhaha tonitruant de notre actualité alités aux soins intensifs...


Et les fruits passeront la promesse des fleurs.


La fin de tant d’ennuis dont nous fûmes la proie

Nous ravira les sens de merveille et de joie

François de Malherbe
Saga ordi, suite et fin... (du moins je l'espère)... Deux semaines passé sans mon ordinateur, avec tous les inconvénients, gymnastique et autre acrobatie possible pour continuer à travailler malgré tout... Au moins quatre visites chez Apple et autant de diagnostics différents... qui se sont révélés tous faux.

Aux dernières nouvelles, hier, on pouvait me rendre mon ordinateur, après l'avoir vidé de son contenu, mais il me fallait réinstaller moi-même toutes mes applications, censément corrompues ou je ne sais quoi... Je possède mon ordinateur depuis une bonne vingtaine d'années... si vous êtes comme moi, je vous mets au défi d'avoir conservé tous vos programmes et «disquettes» d'installation...

Bon, j'ai fais ce que je devais faire depuis le début: je suis allé trouvé mon technicien, celui qui connaît son travail... Son diagnostic n'a pas été bien long: mon disque dur était plein.

Je devrais récupérer mon ordi aujourd'hui... Je n'en dirai pas plus sur le service Apple...
La saga de mon ordinateur ne pouvait s'arrêter là... hélas... Après l'avoir récupéré, j'ai dû retourner chez Apple dès le lendemain pour un nouveau problème... bien entendu, sans rapport avec le précédent incident. Après avoir passé cinq heures au magasin à superviser toutes sortes d'opération, j'ai pu revenir à la maison... où deux minutes après mon arrivée, l'ordinateur faisait de nouveau défaut... retour chez Apple le lendemain matin, dimanche... il y est toujours et y restera au moins jusqu'à vendredi... si tout va bien... Moi, ça ne va pas bien.
Mon ordinateur est revenu à la maison. C'est comme retrouver un ami. Est-ce à dire (ou à espérer) qu'il y a une fin au mensonge ordinaire?
Pendant que les politiciens contribuent à augmenter notre pollution atmosphérique en parcourant le pays d'un bout à l'autre (et je ne parle pas de la pollution spirituelle qui s'enrichit au fur et à mesure de leur mensonge), pendant que l'Occident poursuit ses guerres coloniales sous couvert de croisades humanitaires, pendant que la société du spectacle s'affole ou s'indigne tandis que des artistes restent sur leur quant-à-soi, pendant ce temps, donc, je me lamente: mon ordinateur est chez Apple depuis vendredi dernier! On m'avait parlé de deux ou trois jours... Puis, sûrement le mardi... hier, on me disait, le soir même... ou au plus tard ce matin... On verra bien aujourd'hui si les gens d'Apple parlent le même langage que les politiciens...
Il y a dix-neuf ans, il neigeait à pareille date. Une petite neige mouillée; une journée un peu grise, comme aujourd'hui. Et pourtant, tellement joyeuse et heureuse, bouleversante et troublante, intense et formidable. Il y a dix-neuf ans, Édouard, tu voyais le jour. Et depuis, tu ne cesses de voir toujours plus grand et plus clairement «les choses de la vie», comme on dit.

Ta lucidité, ton courage, ta franchise, ton écoute, ta bienveillance (et j'en oublie) font de toi ce que tu es et ce que tu deviendras: un homme aimable (oui, un gentilhomme), un homme qui force mon admiration à tous les jours et font ma véritable fierté et mon bonheur.

Merci d'être à mes côtés.

La photo de moi est de Mathieu Manikowski
Le dernier week-end était à l'enseigne des adieux et des au revoir... Neveu et nièce de Californie s'en retournent au chaud... «Heureux qui comme Ulysse a fait un beau voyage...»

Je conserve de Madeleine et Patrick le merveilleux souvenir d'êtres profondément artistiques, vrais, curieux, prudents mais volontaires... Patrick nous laisse avec ses chansons (il en mettra en ligne sur My Space comme sur You Tube)... Madeleine continuera son blog américain après avoir terminé (j'imagine) son blog canadien, où vous allez pouvoir admirer ses talents de vidéaste et d'écrivain...

L'hiver se termine avec le départ de nos amis. L'hiver est long et le printemps bien court; on croirait que le temps nous joue des tours et ne nous permet pas toujours de profiter du temps qui passe et trop souvent trépasse...

Et vu tant de regrets desquels je me lamente,
Tu t’ébahis souvent comment chanter je puis

Joachim du Bellay, Les regrets

Plus le temps passe, et plus la frivolité me semble un sujet grave...


Les ouvrage de psychologie populaire pullulent quand vient le temps de parler d'amour. Il est regrettable qu'on ne pense plus à se tourner vers les classiques, mais il n'est pas trop tard pour le faire: Je vous invite donc à vous replonger… au début de notre ère chrétienne, il y a deux mille ans. Relisons Ovide et son Art d'aimer (et de se faire aimer, donc).


Pour choisir l'heureuse élue de son cœur, pas besoin de partir aux quatre vents, elle pourrait se trouver tout près de vous… «celle-là même dont tu pourras croire qu'elle ne veut pas, voudra. L'amour coupable est agréable à l'homme; il l'est aussi à la femme.» Ovide rajoute ce commentaire: «si l'homme sait mal dissimuler, la femme cache mieux ses désirs [mais la passion] est plus ardente que la nôtre et plus folle»


La séduction est un art, comme la chasse d'ailleurs; ruse, technique, talent… Pour séduire la femme choisie, on pourra tout d'abord gagner la complicité de sa servante; puis, il convient de lui écrire tout en gardant à l'œil le conseil suivant: «que ton style soit naturel, tes mots usuels, mais tendre, si bien que l'on croit t'entendre parler.» On se saurait trop complimenter la musique de l'oralité dans les écrits. Silence radio ou rejet, suite à la missive? Peu importe, ne paniquez pas, car, «ce qu'elle te demande, elle craint de l'obtenir; ce qu'elle ne demande pas, elle le souhaite». Mais par dessus tout, cette dernière remarque, sublime: «suivant la volonté de ta maîtresse, sache perdre ton temps.» Ni précipitation, ni abandon...


Inutile, poursuit Ovide de se farder ou se déguiser pour plaire; «une beauté sans apprêt sied aux hommes». Plus étonnant cependant est le conseil suivant: «désire plaire également à l'amant de ta belle; il vous sera plus utile devenu ton ami.» Là, je n'épiloguerai point sur les stratégies et les mœurs amoureuses d'Ovide, mais je me contenterai d'en admirer la sagesse perverse.


J'ouvre une courte paraenthèse sur l'usage de l'ivresse: le vin est un atout dont il ne faudra pas abuser; mais l'ivresse feinte peut en abuser plus d'un, et se révéler judicieux… (je renvoie le lecteur aux subtilités développés par Ovide).


Il faut savoir complimenter, promettre, pleurer et embrasser, user de quelques hardiesses: «Veux-tu la prendre? Demande. Elle ne désire que cette demande», mais souviens-toi: «Sois moins pressant, tu ne seras plus repoussé (…) pour faire pénétrer ton amour, cache-le sous le voile de l'amitié.»


Pour être aimé, il faut être aimable, écrit Ovide. Lapalissade? Alors répétons-le: «présente-toi avec de tendres caresses et des mots qui charment l'oreille, afin que ton amie se réjouisse de ta venue.» Aussi simple que cela paraisse, il est facile de l'oublier…


Soyons persévérant, complaisant parfois, généreux sans démesure (les cadeaux les plus simples sont les plus efficaces), élogieux, dévoué, mais sachons nous laisser désirer par nos absences («la force de l'habitude développe l'amour»), et bien entendu il faut «s'arranger pour que les infidélités demeurent ignorés». La fidélité, écrit Ovide, «c'est à peine si une femme mariée peut suivre cette conduite», alors, pensez, pour un homme… Il faut toutefois craindre la colère des femmes trompées, pire que toutes les fureurs animales réunies, selon lui, mais la jalousie peut se révéler le meilleur des aphrodisiaques (la jalousie est «le souffre» qui anime «le feu presque éteint»). Aux larmes de la femme trompée, répond par «les joies de Vénus»; le plaisir des disputes et de faire la paix, disait ma mère…


Cette question de la fidélité et de la jalousie est bien développée plus loin: «souffre avec patience un rival». C'est la chose la plus difficile qui soit, mais plein de sagesse, car «c'est croître l'amour de deux amants que de les surprendre» (rappelons-le: «l'amour coupable est agréable à l'homme; il l'est aussi à la femme»). L'amour se nourrit de secrets, le secret nourrit l'amour…


Accepte ton sort, écrit Ovide: «Lorsque qu'elle te voudra, tu viendras; lorsqu'elle t'évitera, tu t'en iras; un homme bien élevé ne doit pas être importun.» Et pour les masochistes qui sommeillent en nous, il ajoute: «N'aie pas honte de supporter les injures de ton amie, ses coups, et d'aller jusqu'à baiser ses pieds délicats.»





La dernière partie de son livre est réservée aux femmes et s'adresse donc à elles. Je passe sur l'art de prendre soin de sa beauté et de sa personne (chevelure, vêtement, maquillage…), art de la discrétion («l'art n'embellit la figure que s'il ne se montre pas»); un brin d'artifice ne nuit pas, et on apprend donc à rire comme à pleurer ou à marcher; laissez-vous désirer, écrit-il: «laissez à découvert, du côté gauche, l'extrémité de l'épaule et le haut du bras (…) cette vue me donne envie de couvrir de baiser tout ce que je vois…»


«C'est un charme qu'une voix mélodieuse: que les jeunes filles apprennent à chanter» et sachent réciter les poésies («est-il rien de plus voluptueux que ces vers [de Sapho]»), pratiquent la danse et sachent jouer (échecs ou poker, qu'importe les jeux car «à la faveur du jeu, souvent naît l'amour (…) En jouant nous cessons d'être sur nos gardes».


Ovide poursuit: ne vous cachez pas et allez vers le monde car «ce qui reste caché demeure inconnu» (le port du voile ici n'est donc pas conseillé) et il faut savoir laisser «pendre l'hameçon» car qui sait quel poisson y mordra… Méfiez-vous toutefois des séducteurs impénitents («ce qu'ils vous disent, ils l'ont dit à mille autres»).


Les conseils d'Ovide sur la lettre d'amour sont exquis, raffinés et un brin perfides: il laisse à la femme le soin de reconnaître la sincérité dans les mots de l'amant («les termes employés suffiront à te faire connaître (…) leur sincérité»). Soyez prudent cependant dans vos réponses: confiez vos missives à quelqu'un de sûr ou travestissez au besoin votre écriture ou astuce suprême, «lorsque vous écrivez à votre amant, ayez toujours l'air de vous adresser à une femme; dans vos billets, dites “elle” où il faut “il”.»


Sachez user de vos amants selon leur qualité: que le riche vous offre son argent, l'avocat ses conseils… et que le poète chante vos louanges («attendre de l'argent des doctes poètes est un crime»). Ovide rappelle ceci: si les vieux brûlent d'un amour plus lent, cet amour n'en est pas moins sûr; si le jeune est plus enflammé, plus fécond, il n'en est pas moins court. La sagesse ici fait écrire à Ovide: «les fruits qui ne durent pas, dépêchez-vous de les cueillir.» Notre époque parle des femmes panthères pour évoquer ce goût des amours plus excessives… mais plus éphémères.


Ovide termine son livre par ce dernier conseils aux femmes: pour être aimée longtemps il convient de se laisser désirer longtemps. Fermer la porte au besoin. Feindre la peur si nécessaire («sans danger, le plaisir est aussi moins vif»)…


L'arme ultime, l'arme de séduction massive est simple: «Faites en sorte (et c'est facile) que nous nous croyions aimés: la passion se persuade aisément ce qu'elle désire.» Surtout chez le vaniteux, ajoute Ovide. Le narcissisme, en effet, est source de grande crédulité.


Je termine donc avec les mots du poète: «Que les propos d'amour et les doux murmures ne s'interrompent jamais et que les mots lascifs trouvent leur place parmi vos ébats.»


C'est vendredi. Je vous laisse sur ces sages paroles et vous souhaite un bon week-end.

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Patrice Dansereau, courtier immobilier et écocourtier chez Via Capitale du Mont-Royal

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